BRITISH MUSEUM, PRINTROOM (Cabinet des Estampes du Musée Britannique), Londres. Dessins et estampes.
La « Printroom », où sont conservés les dessins et estampes du British Museum, est l'un des huit départements de ce dépôt, aussi célèbre par le nombre de ses trésors que par leur richesse. Le British Museum doit son origine à la réunion, en 1753, de trois collections importantes. L'une, composée de manuscrits et chartes, avait été offerte à la nation en 1700 par Sir John Cotton, Bart. à qui elle venait de son grand-père, Sir Robert Bruce Cotton. Abritée d'abord à Ashbarton House, elle y souffrit d'un incendie en l731. Les deux autres, achetées par le parlement, étaient la collection de Sir Hans Sloane, Bart., pour laquelle nous renverrons au L.2292, et la collection de manuscrits et chartes, formée par Robert Harley, Earl of Oxford, et Edward, deuxième Earl of Oxford, acquise des deux filles de ce dernier : Henrietta, Countess of Oxford, et Margaret, Duchess of Portland. C'est dans cette collection que figuraient aussi les estampes, pamphlets, frontispices, etc., recueillis par John Bagford (1650-1716), et achetés à sa mort par le Earl of Oxford. En même temps, pour abriter ses acquisitions, le parlement achetait, pour £ 10.250, l'ancien palais du Duke of Montague, dans Great Russell Street. L'institut prit rapidement un grand développement, et des constructions nouvelles durent être ajoutées, notamment en 1772 après l'achat des marbres d'Hamilton, en 1805, après l'achat de ceux de Townley, et en 1816 (entrée des bas-reliefs du Parthénon). En 1823, lorsque George IV eut offert à l'Angleterre la bibliothèque formée par George III (environ 62.250 vol.), le parlement décida la construction d'un nouvel édifice, sur les plans de Sir Robert Smirke, complétés par son frère Sydney Smirke. Ce monument, construit de 1823 à 1855, et qui par la suite reçut quelques additions, est celui que nous voyons aujourd'hui. Des agrandissements récents, le plus important fut l'édification des « King Edward VII's Galleries » (galeries du roi Edouard VII) sur les plans de l'architecte Sir John Burnet, dans lesquelles furent transférées, en 1913 et 1914, les collections de la « Printroom » (Voir The Buildings of the British Museum illustrated from prints and drawings, 1914).
Pour faire un rapide historique de la progression de la « Printroom », il nous suffira de rappeler ses principaux achats, et surtout les nombreux dons et legs faits aux différentes époques par des personnages auxquels, pour la plupart, nous avons déjà consacré des articles. Nous renverrons le lecteur à ces notices. Au XVIIIe siècle nous trouvons à citer : en 1769 le legs William Fawkener (voir L.921) et en 1799 l'important legs du Reverend C. M. Cracherode (L.606). Nombreuses sont les entrées importantes au XIXe siècle. En 1811, l'achat G. Cumberland (œuvres de Bonasone) et le legs J. Charles Crowle ( « Pennant's London » en 14 vol., estampes topographiques, environ 5500 pièces). En 1816, legs Francis Towne (dessins de Rome). En 1818, le don Karl Marie Ehrenbert von Moll (voir L.1818), don Dorothea Lady Banks (L.216), et l'achat Charles Burney (L.315) ; 1824, l'important legs Richard Payne Knight (L.1577) ; 1834, achats à la vente Buckingham, legs William Frederick, Duke of Gloucester (Clarendon, History of the Rebellion et Whiteloek, Memoirs of Charles Ist., avec figures ajoutées), et legs Francis Douce (les Dürer qui lui venaient de Nollekens, et ses « essays » non publiés, voir n° 987) ; 1836, achat au marchand W. Smith des eaux-fortes de John Sheepshanks (L.2285) ; 1842, achat à Colnaghi d'un très bel œuvre de Raphaël Morghen (formé par Jacob Tarma, palais Priuli à Venise, avec l'aide d'un grand ami de Morghen, du nom d'Abrizi ; les héritièrs de Tarma avaient vendu l'ensemble à L. Bardi, qui l'augmenta encore, puis le céda à Colnaghi) ; 1849, don H. J. Brooke (L.1321) ; 1851, don William Smith (L.2299) ; 1855, don Chambers Hall (L.551) ; 1859, dessins de Michel-Ange, vendus par un Buonarroti (voir Casa Buonarroti, Florence, n° 338) ; 1867 et 1869, dons J. H. Anderdon (L.50) ; 1868, achat des caricatures politiques de Edward Hawkins (qui avait été conservateur des antiquités, au musée, de 1826 à 1860), et legs Felix Slade, (L.2291) ; 1878, legs John Henderson (L.1256) ; 1880, achat pour £ 3000 de la collection Frederick Crace (environ 7000 pièces topographiques sur Londres, fonds fournis par la vente de doubles faite en 1880, voir plus loin) ; 1882, don John Deffett Francis (L.1444) ; 1887, don Henry Vaughan, legs du même en 1899 (voir L.1380) ; 1888, legs Arthur Ditchfield (lithographies et eaux-fortes) ; 1891, donation Lady Charlotte Schreiber, legs de la même en 1895 (L.534) ; achat Malcolm en 1895 (L.1489) ; 1895 et 1904, dons W. Mitchell (L.2638) ; 1897, legs A. W. Franks (L.344) ; 1902, don Lord Cheylesmore (L.445) et achat de la collection James Reeve (L.383) ; 1910, legs George Salting (L.2260), et 1917, don Lady Lucas (L.1696).
Huit conservateurs se sont succédés à la tête du « Department of Prints and Drawings » ou « Printroom ». Le premier fut William Alexander (1767-1816), l'artiste connu par plusieurs ouvrages sur la Chine, où il voyagea (The Costume of China, 48 pl., 1805 ; The Punishments of China, 1805, etc.). Il entra en fonctions en 1808 et y resta jusqu'à sa mort. Sous son administration furent dressés plusieurs inventaires dont l'un, pour les estampes, en 9 volumes, était, suivant une note qu'on trouve dans le t. VI, utilise dans la « public room ». Alexander, en même temps conservateur des antiques, exécuta les dessins pour la publication des terres cuites et marbres du musée (en 3 vol., 1810-1812-1815, descriptions par Taylor Combe, premier conservateur),et publia lui-même le t. IV, antiquités égyptiennes. Son successeur fut John Thomas Smith (1766-1833), dessinateur topographique, l'auteur de Nollekens and his times et de A Book for a Rainy Day, fils du sculpteur et marchand d'estampes Nathaniel Smith (voir L.2296). Au décès de Smith, le poste échut à William Young Ottley (1771-1836), célèbre érudit et amateur (voir L..2662), dont le court passage à la « Printroom » (1833-1836) est marqué par l'établissement d'inventaires précieux pour les notes concernant les sources des collections. Henry Josi (1802-1845), qui vient ensuite, le fils de Christian Josi (graveur et marchand d'art, voir L.573), fit aussi dresser de nouveaux inventaires, révisant ceux d'Ottley, et dont l'un, de 1837, donne 9302 dessins et 45.752 estampes. William Hookham Carpenter (voir L.2626) devint conservateur à la mort de Josi, et le resta jusqu'à son propre décès, en 1866 rédaction d'un « Catalogue of drawings » par écoles, resté manuscrit). Puis vint George William Reid (1819-1887), pour lequel nous renverrons à notre article, L.1210. En 1884 lui succéda Sir Sidney Colvin (né en 1845), qui le premier fit publier des répertoires par noms d'artistes représentés dans le cabinet, et à qui l'on doit l'importante publication sur les dessins d'Oxford, et Early engraving and engravers in England, with list of works and engravers by A. M. Hind (1905). A l'époque de Reid et de Colvin, exactement de 1869 à 1892, appartenait à la « Printroom », en qualité d'adjoint (« acting assistant keeper » à partir de 1875), Louis A. M. Fagan l'auteur du premier livre important consacré aux marques de collectionneurs, paru en 1883 sous le titre de Collectors' Marks. Colvin fut remplacé, en 1912, par le savant conservateur actuel, Campbell Dodgson (voir L.521), qui est assisté des spécialistes réputés Laurence Binyon, « assistant-keeper in charge of the sub-department, of oriental prints and drawings », connu par ses études sur la peinture de l'Extrême-Orient et la gravure japonaise, et A. M. Hind, l'auteur de la Short History of Engraving and Etching (1908, 3e édit. 1921).
La bibliographie relative à la « Printroom » est trop nombreuse pour que nous ne nous bornions point à rappeler les travaux ou ouvrages les plus caractéristiques : Catalogue of prints and drawings, Section I, satires personnelles et politiques, 4 vol. London 1870-1883 ; Handbook to the Department of prints and drawings in the British Museum, par L. Fagan (1876), et la critique anonyme de cet ouvrage, parue la même année : The Printroom of the British Museum, An enquiry by the ghost of a departed collector ; R . Fisher, The Printroom of the B. M. (1876) ; Catalogue of playing cards, par W. H. Willshire (1876 -1877) et Catalogue of early prints of the German and Flemish schools in the B. M., par le même ; Reproductions of Prints (importante publication commencée en 1882 et qui comportait, en 1909, 21 vol. en 3 séries) ; Fagan, The Art of Michel-Angelo, as illustrated by the various collections in the B. M. (1883) ; Reproductions of drawings by old masters, 4 parties (1888-1891-1893-1894) ; L. Binyon, Catalogue of the drawings by British Artists, 4 vol. (1898 -1907) ; C. Dodgson, Catalogue of early German and Flemish woodcuts, (vol. I. 1904, et II. 1911) ; F. M. O'Donoghue, Catalogue of engraved British portraits ... in the B. M. (vol. I-IV, 1908-1914) ; A. M. Hind, Catalogue of early Italian engravings in the B. M., edited by S. Colvin (1910), et, du même, Catalogue of drawings by Dutch and Flemish artists (Vol. I. Rembrandt et son école, 1915). Citons à part deux publications sur l'art oriental, fort bien représenté au B. M., Catalogue of Japanese and Chinese paintings, par W. Anderson (1886), et Catalogue of Japanese and Chinese Woodcuts, par L. Binyon (1916).
En général la « Printroom » a disposé de ses doubles par échanges à l'amiable ; deux ventes furent pourtant organisées.
Des marques reproduites ci-contre, la première (L.296) est la plus ancienne, elle ne figure que sur peu de feuilles. Les deux suivantes (L.297 et L.298) ont été introduites dans la première moitié du XIXe siècle. La marque L.298 était réservée aux pièces de la collection Cracherode, désignée par les initiales C. M. C. qui se lisent dans le bas. Quelquefois elle servit, et c'était l'emploi normal de la marque L.297, à marquer d'autres pièces, dont la provenance était indiquée par des initiales manuscrites ajoutées au centre, par exemple H. S. pour Sloane, W. F. pour Fawkener. Elles ne sont plus en usage. - Le L.299 servit au milieu du XIXe siècle à marquer les grandes estampes modernes, et les deux suivantes, L.300 et L.301, furent adoptées vers la même époque pour toutes les feuilles et servent toujours. Enfin les marques L.302 et L.303 ont servi dans la seconde moitié du XIXe siècle, seul le premier de ces deux timbres reste encore en usage. Le spécimen reproduit montre comment on y fait figurer l'année, le mois et le quantième, puis le numéro d'ordre. Ces numéros d'ordre sont donnés, par date d'entrée, à partir de 1. Voir d'autres marques : L.229, L.389-391, L.2046, et L.2051. Les timbres spéciaux dont sont marquées les pièces provenant de collections importantes sont reproduits sous les nos auxquels nous renvoyons dans notre article. Les deux derniers cachets, L.304 et L.305, sont des estampilles de doubles, le premier employé à l'époque indiquée par le millésime, le second encore actuellement en usage ; les initiales qu'on voit au milieu sont celles du conservateur qui autorise là cession. Autres marques de doubles reproduites aux L.703 et L.704.
Toutes ces marques sont généralement apposées au verso, vers le coin inférieur gauche, de façon à ce qu'elles puissent être vues en tournant le coin droit du recto. Les quelques épreuves marquées au recto proviennent du département des imprimés, où les gravures illustrant les livres sont parfois timbrées au recto, en rouge.
VENTES
I. 1811, 8-11 mai, Londres (chez Philipe). Doubles, estampes et recueils. - Produit £ 811 19s. 6d.
II. 1880, 21 avril, Londres (direction Sotheby). Doubles. Estampes, presque exclusivement des eaux-fortes de maîtres hollandais, et des burins des anciens italiens (surtout Marc-Antoine) et allemands. 93 nos. L'objet principal de la vente était de réaliser les fonds nécessaires à l'achat de la collection Crace. Elle eut lieu au Musée même. Principaux prix : Baccio Baldini, les Sibylles £ 8 et £ 22, Domenico Campagnola, les Bergers musiciens £ 44, Schongauer, la Crucifixion £ 72, Lucas de Leyde, l'Empereur Maximilien £ 80, et Jésus-Christ présenté au peuple £ 28, Rembrandt, Rembrandt appuyé £ 116, Vue d'Amsterdam £ 34, la Campagne du peseur d'or £ 40, le Peseur d'or £ 124, Berchem, la Vache qui s'abreuve £ 44, Berger jouant du flageolet £ 22, P. Potter, le Berger (2e pl.) avec l'adresse de Clement de Jonghe £ 24, Tête de vache £ 25, d'après Reynolds, Miss Jacobs par John Spilsbury, première épreuve £ 65. - Produit £ 2193 9s.
C. M. CRACHERODE (1730-1799), ministre protestant (« reverend ») et amateur, Londres. Estampes et dessins.
Clayton Mordaunt Cracherode, né à Taplow (Buckinghamshire), embrassa l'état ecclésiastique et fut pendant quelque temps curé à Binsey, près Oxford. En 1784 il fut nommé « trustee » du British Museum. Il était personnellement grand collectionneur de livres, dessins et estampes. S'épuisant en achats continuels, il réunit 4500 volumes rares en belle condition, sept portefeuilles de dessins et cent portefeuilles d'estampes (remarquables pour les Dürer et Rembrandt) qu'il légua tous au British Museum. Il y joignit ses pierres gravées et ses monnaies. Il habitait Queen Square. Testament daté 9 avril 1702 [corr. suppl. 1956 : 9 avril 1792]. Son portrait gravé dans le Bibliographical Decameron de Dibdin t. III ; voir dans ce même ouvrage les notes p. 326-336.
La dernière marque, déjà reproduite à l'article du British Museum (L.298), a parfois servi comme marque générale de ce musée, malgré les initiales C.M.C. qui y figurent. C'est ainsi qu'on la rencontre avec les initiales Hans Sloane et de W. Fawkener ajoutées au milieu, à la main. Voir aussi les marques L.465 et L.598.