JAMES GIBBS (Londres 1804-id. 1891), libraire, relieur, Londres. Dessins et estampes.
Cette marque composée des initiales J et G entrelacées mesure 6,5 mm de diamètre. Elle est par exemple apposée sur un dessin de Jacques Callot (Nancy, Bibliothèque municipale, Rés. 20, vol. 1) et sur une estampe anonyme, Portrait de René van Châlon, conservée au British Museum de Londres (Prints & Drawings, inv. 1896,1215.8). Elle avait également été signalée sur une manière noire par un graveur non identifié d’après James Wills, Le Révérend Alured Clarke, publiée par William Haskoll, à Londres (autrefois dans la collection de l’Hon. Christopher Lennox-Boyd, inv. P46,705).
Lugt avait vu un relevé de la marque, établi par un des collaborateurs de la galerie Kennedy & Co, de New York, dans leur exemplaire du premier volume des Marques de collections sur une « Dixon mezzotint of David Garrick » (archives de la Fondation Custodia, mars ou avril 1943 [Lugt était alors à New York]). Nous ne savons pas pourquoi Lugt ne l’avait pas rapproché d’une marque identique, présentée dans le manuscrit non publié d’Alphonse Wyatt Thibaudeau sur les marques de collections au folio consacré à Gibbs. Sur celui-ci, à côté de deux relevés de la marque, Thibaudeau avait noté « J. Gibbs printseller little Newport Street ».
Cette marque revient à James Gibbs, « a collector from birth », ami du poète et bibliophile Frederick Locker, dit Locker-Lampson (1821-1895) (H. Jackson, The Anatomy of Bibliomania, New York 1950, rééd. Urbana et Chicago 2001, p. 546). Dans son autobiographie, My Confidences (Londres 1896), Locker rapporte notamment ceci : « his mother told him that while he was a babe in arms, he would instinctively clutch at any print or drawing that came within his reach ; indeed he may be said to have been doing this, and not much else, all his life ».
James Gibbs fut en effet libraire, relieur, vendeur d’estampes mais c’était, avant tout, un collectionneur compilateur. On remarque qu’en bas d’une page d’un recueil réalisé par ses soins, Gibbs a collé la planche Bibliopegus de l’édition de l’Orbis sensualim pictus de 1777, et a ajouté à la plume un petit commentaire « The collector of these wood-cut is a Book-Binder » suivi de ses initiales entrelacées de la même manière que la marque décrite ici (University of Reading, University Library, A set of seven scrapbooks, Folio 082-FIR).
Nous devons la plupart des renseignements résumés ici à David Knott qui a étudié cette série de sept albums dans un article intitulé ‘J. Gibbs’s Illustration of popular literature’ et que l’on consultera avec profit.
Fils d’un relieur, George Gibbs (mort en 1839) fit son apprentissage chez John Jackson de 1818 à 1825. Exerçant d’abord au 11 Great May’s Buildings, St Martin’s Lane, puis à Lisle Street, Leicester Square, il s’établit au plus tard en 1844 au 8 Great Newport Street, ce pendant quarante ans. Il est mort à Ifield Road, Brompton en 1891 et est enterré au cimetière de Brompton.
Le fait de gloire de James Gibbs est d’avoir compilé pendant plus de trente ans la ‘Kitto Bible’, en ajoutant quelque 30 000 illustrations à une bible publiée en 1838, enrichie de notes de John Kitto. Cette Bible, qu’un prospectus de l’époque décrit comme ‘the largest and most elaborately illustrated Bible in the world’, contenait des spécimens de bibles des XVe et XVIe siècles, des enluminures, près de 3 000 dessins originaux et des estampes, notamment des plus grands maîtres (Rembrandt, Dürer). Elle est aujourd’hui conservée à la Huntington Library, San Marino, California (Rare books 49000 ; lire l’article de Lori Ann Ferrell, ‘Biblical proportions : how the art of extra-illustrations produced a unique version of the Bible ‘, http://huntington.org/uploadedFiles/Files/PDFs/f06frontiers.pdf. pp. 16-20).
Gibbs a, sa vie durant, fait des collections plus modestes sur un grand nombre d’autres sujets et a continuellement fabriqué des albums d’illustrations, incrustant et montant des centaines de papiers, regroupant des milliers de feuilles autour de différents thèmes. Sa vie est principalement connue grâce à son amitié avec Frederick Locker. On découvre le personnage, non seulement dans l’autobiographie de Locker, citée plus haut, mais aussi grâce à la correspondance échangée entre les deux bibliophiles, qui relate tous les aspects de sa vie et de son activité (New Haven, Yale University, Beinecke Library, Locker-Lampson MSS, part of the James Marshall and Marie-Louise Osborn Collection).
David Knott a pu écrire : « his passion was to acquire and collect, he was very reluctant to sell ‒ a distinct disadvantage to someone whose livelihood depended on it, and the root of many of his difficulties ».
La marque L.1081 doit être rendue à l’amateur Bindon Blood (L.3011), puisque c’est lui qui inscrit le nom de Gibbs comme indication de provenance.
L’initiale G répertoriée sous le numéro L.1125 revient également à James Gibbs. On remarque que la graphie diffère de cette marque et de celle inscrite sur l’un des sept albums étudiés par David Knott auquel cet article fait référence. Lugt (qui se trompe de prénom) y indique que ‘John’ Gibbs fut ensuite établi à Little Newport Street ; nous ne savons pas, cette fois-ci, s’il avait pris ce renseignement dans le manuscrit d’Alphonse Wyatt Thibaudeau.
SOURCE
A. Wyatt Thibaudeau, Dictionnaire des marques et monogrammes d’amateurs, manuscrit, Berlin, Kupferstichkabinett, WGa 0 19, folio 510.
BIBLIOGRAPHIE
D. Knott, James Gibbs’s Illustrations of popular literature (https://www.reading.ac.uk/web/FILES/special-collections/featuregibbs.pdf consulté le 20 juillet 2016).
Date de mise en ligne : octobre 2016.